L’Alsace au XVIè siècle
2.2. Le morcellement territorial
La Haute Alsace
La Basse Alsace
La décapole
Les états provinciaux d’Alsace
L'apogée de Strasbourg
Vie économique et sociale
2.2.6. Vie économique et sociale
L'Alsace profite grandement de l'essor du commerce qui caractérise le début des Temps Modernes. Tous sont unanimes pour faire l'éloge de l'Alsace, de sa prospérité, de sa richesse. Ainsi le « Weltbuch » de Sébastien Franck (1534) ou la « Cosmographie » de Sébastien Munster (1552 éd. française), ou encore les éloges de Wimpfeling, Matthias Ringmann Philesius, Bernard Hertzog, Blinde Rösslin qualifiant le pays de « Edelsass »...
2.2.6.1. Agriculture
Elle est une des plus riches de l'Europe. Les céréales font l'objet d'exportations florissantes. Les cultures maraîchères dominent dans la région de Strasbourg, Colmar et Sélestat, ainsi que les plantes industrielles (Colza, chanvre, lin). Arbres fruitiers et châtaigneraies donnent de bonnes récoltes. Tous ces produits sont vendus en Saxe, Thuringe, Hollande et Angleterre. La vigne maintient au plus haut niveau sa qualité et sa renommée européenne.
Le gros bétail est élevé dans le Sundgau et les Hautes Vosges où l'on pratique l'alpage et où l’on fabrique le fromage de munster, déjà réputé. Chevaux, ovins et porcins sont élevés dans tout le pays.
2.2.6.2. Mines et artisanat
A la fin du XVè sont redécouvertes les mines d'argent de la vallée de Sainte Marie. Elles avaient été abandonnées au XIVè à cause des difficultés techniques. Mais au XVIè fonctionnent 67 mines et 10 fonderies. Plus de 2 000 mineurs y travaillent et la ville de Sainte Marie prend naissance. On trouve aussi dans la vallée du plomb, cuivre et cobalt.
Les gains reviennent aux Habsbourg et aux Ribeaupierre pour la partie sud, et aux ducs de Lorraine pour la partie nord. Rapidement les mineurs forment la corporation des « Knappschaft » avec ses coutumes et son juge, le « Bergrichter ».
Vers la fin du XVIè, le rendement minier commence à baisser. Quant au fer, il est exploité à Giromagny, Framont sur Bruche et en Alsace du nord.
L'artisanat produit pour les besoins de la population et pour l'exportation tissus, cuirs, armes, vaisselle, bijoux, livres...
L'organisation reste corporative, mais de plus en plus conservatrice : les corporations deviennent de vrais organes politiques et administratifs : ainsi à Strasbourg il n'y a plus que 20 corporations en 1482 et 10 à Colmar en 1521. Une aristocratie artisanale maintient ses prérogatives et rend difficile l'accès à la maîtrise. Bien des compagnons restent ouvriers alors que la maîtrise est largement ouverte aux fils des maîtres ou à des compagnons ayant épousé la fille d'un maître. Cependant la corporation forme une classe stable et solide qui assure la force des villes florissantes d'Alsace.
2.2.6.3. Commerce et transports
Le commerce connaît une grande activité, surtout à Strasbourg, où bateliers et armateurs forment la puissante corporation « A l'Ancre » La Wantzenau forme l'avant-port de la ville. Mais lors de la Réforme, l'évêque revendique la possession de ce village, et le Magistrat fait construire un nouveau port vis-à -vis de Kehl. Les bateliers de la ville dominent le fleuve de Bâle à Mayence. Les échanges sont de même teneur qu'au Moyen Âge, mais leur quantité est bien plus importante. Deux nouvelles exportations apparaissent : celle d'eau de vie et de vinaigre.
Strasbourg est un centre de transit considérable. Les marchandises affluent. Déposées à la douane et soumises à des taxes, elles repartent vers les pays lointains. Ainsi la ville s'assure d'énormes profits. Les foires contribuent à sa prospérité. Les commerçants de Strasbourg sont en relation avec tous les pays d'Europe. Mais ils ne fondent pas de succursales à l'étranger et ne s'adonnent par au trafic maritime. Ils se contentent de faire le commerce de transit des marchandises européennes, s'enrichissant fortement et devenant ainsi les premiers capitalistes Alsaciens. Par eux naît le nouveau système du commerce de l'argent et du crédit.
Les Strasbourgeois utilisent les capitaux amassés aux achats de terres puis, fait nouveau, aux prêts fructueux : la Banque de Strasbourg d'abord privée, puis municipale, est créée en 1482-1484 et attire rapidement une nombreuse clientèle.
A un moindre degré, les autres villes Alsaciennes participent à ce développement économique, surtout Colmar, Haguenau et Sélestat.
2.2.6.4. La vie quotidienne
2.2.6.4.1. Les paysans
Les blessures de la Guerre des Paysans se guérissent vite. Les conditions de vie de la paysannerie restent modestes comme par le passé. On ne parle plus guère des « serfs » non - libres, la plupart étant des paysans censiers, les uns pauvres, les autres aisés. Mais la grande partie des terres reste aux mains des nobles, bourgeois ou clercs. Les modes d'exploitation ne changent pas, ni la vie matérielle des paysans.
2.2.6.4.2. Les citadins
La vie matérielle s'améliore nettement dans les villes : grandes et belles maisons en pierre avec portails, larges fenêtres, balcons, oriels. Le mobilier s'enrichit : meubles magnifiques, abondante vaisselle en terre cuite ou étain, gobelets d'argent. Dans l'habillement, la mode bat son plein. Banquets, fêtes, danses sont fort abondants. L'Alsace du XVIè donne l'impression d'une grande joie de vivre.
Mais dès 1550 des changements se produisent : troubles religieux et querelles politiques créent de nombreux désordres. La nouvelle élite politique au pouvoir tient pour un protestantisme beaucoup plus puritain et austère… L'insécurité perturbe la vie économique et quelques faillites inquiètent le milieu économique… Au début du XVIIè, la situation va se tendre brusquement.